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Détail

Une maladie émergente, est définie selon la plupart des spécialistes comme étant une maladie nouvelle, une nouvelle forme de maladie ancienne ou une maladie existante survenant dans une zone géographique qui en était précédemment indemne. Dans une acceptation large de la définition, on peut aussi y inclure les maladies en recrudescence, quelque fois qualifiées de ré-émergentes, c'est-à-dire des maladies qui ne posaient pas ou plus de problème et qui font leur retour sur le devant de la scène.

Depuis quelques décennies, une apparition et un développement, de maladies inconnues auparavant, ont été observés avec une fréquence inhabituelle. En effet, le nombre de tels évènements a presque été multiplié par quatre en 50 ans (1940-1990) ; et ce, avec l'apparition de virus très pathogènes tels que : le VIH/SIDA (Syndrome d'Immunodéficience Acquise), le Syndrome Respiratoire Aigu Sévère (SRAS), la grippe aviaire (H5N1), la fièvre hémorragique à virus Ebola, l'Encéphalopathie Spongiforme Bovine, etc. Par ailleurs, un certain nombre de maladies vectorielles ont émergé, comme le virus Zika en Amérique, ou ont subi une modification importante de leur épidémiologie, comme la recrudescence de la fièvre du Nil Occidental ou l'endémisation de la fièvre catarrhale ovine dans le bassin méditerranéen. Ceci met en évidence la mondialisation croissante des risques sanitaires ainsi que l'importance de l'interface Homme-animal-écosystème dans l'évolution et l'émergence de pathogènes.

Les maladies émergentes apparaissent comme la conséquence de la rupture d'un état d'équilibre préexistant, rupture qui rend les conditions de transmission favorables et peut survenir en faveur de modifications des propriétés de l'agent pathogène (franchissement nouveau d'une barrière d'espèce) ou de profonds changements de l'environnement au sens le plus large. Cela est particulièrement remarquable dans le cas des maladies vectorielles, où les interactions entre les vecteurs, leurs hôtes et les agents infectieux transmis sont fortement dépendants de l'environnement. Si on s'intéresse à ces mécanismes sous le prisme des dérives des rapports de l'Homme avec la nature, on peut penser à l'exposition des populations humaines à des pathogènes forestiers. Ainsi, il a été démontré que le contact homme/réservoir nouvellement créé dans des fronts de déforestation augmente le risque de paludisme au Pérou, de la leishmaniose cutanée au Costa Rica ou d'hantavirus au Panama. De même, le développement de l'habitat en bordure de forêt, dans une perspective d'une vie hors de la ville, a entraîné une exposition de ces populations à la maladie de Lyme aux Etats-Unis. Ces modifications environnementales peuvent aussi survenir en milieu urbain.

En santé animale, le développement de l'élevage intensif à l'opposé d'un élevage traditionnel extensif, a abouti à une augmentation significative des densités animales, et à la création de conditions environnementales favorables à la multiplication de certains vecteurs, rendant donc les conditions propices à une transmission intense de maladies, notamment vectorielles.

Par ailleurs, la mondialisation des échanges commerciaux et l'intensification du transport aérien permet le franchissement par des pathogènes et par des vecteurs de barrières naturelles auparavant infranchissable : les déserts, les chaînes de montagne ou encore les océans. Ainsi, un vecteur majeur des virus de la dengue ou de Chikungunya, Aedes albopictus a ainsi pu sortir de son aire de distribution naturelle d'Asie du sud-est pour coloniser une bonne partie de l'Europe, des Amériques et de l'Afrique, notamment à la faveur du commerce international des pneus. Ainsi, le bassin méditerranéen est maintenant une zone de transmission des virus de la dengue ou de Chikungunya. De même, le transport aérien permet à des personnes, infectées par un virus, d'être transportées dans un autre continent à des vitesses jamais atteintes dans l'histoire de l'humanité, permettant d'introduire le virus, même dans le cas de maladie virale à virémie extrêmement courte. C'est de cette manière que l'épidémie au virus Zika a ainsi pu gagner, à partir des îles de l'Océan Pacifique, le continent sud-américain, puis les Caraïbes, provoquant des centaines de milliers de victimes. L'Homme est aussi, par sa révolution industrielle, responsable d'un bouleversement écologique à venir : le « changement climatique ». Si on peine à mesurer l'impact de ce changement en cours, notamment d'un point de vue sanitaire, l'augmentation des températures en Europe et dans le bassin méditerranéen a vraisemblablement été responsable de l'augmentation des populations de Culicoides imicola en zone méditerranéenne et de l'augmentation des capacités de transmission des Culicoides autochtones. Ce sont ces mécanismes qui sont soupçonnés d'avoir provoqué l'émergence et l'endémisation de la fièvre catarrhale ovine dans le bassin méditerranéen, causant la mort de plus d'un million de moutons entre 1998 et 2005, et aussi l'émergence de son sérotype 8 en Europe, y provoquant entre 2006 et 2008 la plus intense transmission vectorielle connue depuis les pestes moyenâgeuses.

Au demeurant, quel que soit le mécanisme à l'origine des maladies émergentes, ou ré-émergentes, elles laissent le plus souvent l'Homme désarmé. D'autant plus que la plupart d'entre elles (75 %) sont des zoonoses, impliquant souvent un processus de lutte compliqué faisant intervenir plusieurs acteurs et disciplines à l'interface Homme-animal-écosystème.

La thématique des maladies émergentes est à l'ordre du jour de l'agenda de la santé mondiale suite à la succession de menaces sanitaires causées par ces maladies ces dernières décennies à la dite interface. La FAO, l'OIE et l'OMS ont mis en avant cette thématique depuis 2005 suite à l'émergence de l'influenza aviaire hautement pathogène, et plus récemment d'autres maladies infectieuses dans le cadre de l'approche « One Health » et la sécurité sanitaire mondiale.

Dans ce cadre, et à suite à la parution récente de la seconde édition de l'ouvrage du Pr. O. Fassi Fihri intitulé « Les maladies émergentes, dérives des rapports de l'Homme avec la nature », une équipe d'enseignants-chercheurs présidée par Dr. Mhamed Sedrati a jugé opportun de consacrer cette thématique et de débattre les enjeux spécifiques qui y sont liés, par l'organisation d'une conférence internationale.


 

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